IDE, révolutionnez-vous !!!

Publié le par Oiseau2nuit

Bon, aujourd'hui, c'était le jeudi noir, jour de grève nationale. J'aurai pu faire grève mais ayant travaillé cette nuit, ben fallait bien que je dorme un peu quand même surtout que je réattaque cette nuit. De plus, je suis dans le privé et il n'y avait pas de mouvement de grève de prévu dans mon établissement. A moins qu'il soit passé inaperçu.


Cette nuit, on a eu une petite discussion avec mes collègues (2 IDE + nous les 2 AS). Je leur ai fait part du fait que j'adhérai à la pensée – pensée développée par des IDE – que les IDE eux-mêmes se tiraient une balle dans le pied, qu'il leur appartenait de contribuer à la revalorisation de leur diplôme en se positionnant comme des professionnels non corvéables à souhait et respectant la législation relative à leur profession. En gros, vraiment en gros.


J'ai tenté de leur expliquer que les médecins n'étaient pas leur patron – enfin, tant que ce n'étaient pas eux qui payaient leur salaire – qu'elles avaient le droit de s'opposer à eux :

 

  • en refusant de faire des choses illégales (prescription par téléphone, accepter sans rien dire, et sans le dénoncer, qu'un médecin de garde ne réponde pas au téléphone ou bien les jette parce qu'elles ont eu le malheur de les appeler ou pire qu'il refuse de se déplacer pour venir voir un de leur patient en difficulté – merde, il est de garde que diable et payé pour ça en plus ! )

  • en refusant d'être traitées comme des moins que rien quand un médecin à commis une erreur mais ne l'assume pas, tentant de rejeter la faute sur elles;

  • en ayant un oeil acéré sur les prescriptions et en n'hésitant pas à interpeler le médecin s'il y en a une qui paraît suspecte – car si elles l'appliquent et qu'il y a un souci, on leur reprochera d'avoir été bêtes et disciplinées.

     

Je leur ai demandé pourquoi elles ne s'opposaient pas légitimement à la Direction qui leur impose de travailler dans des conditions inadmissibles en :

 

  • refusant de venir bosser au dernier moment parce qu'ils n'ont trouvé personne, alors qu'à côté de ça, on leur refuse des nuits supp' parce que ça fait trop;

  • refusant de prendre en charge un nombre impressionant de patients parce qu'il manque du personnel. Oui, bon, il y a la conscience professionnelle qui rentre en jeu mais quid de la conscience professionnelle quand vous tuerez un patient parce que vous n'avez pas pu décemment vous occuper de lui ? Ben, elle sera au placard et vous, les menottes aux poignets, encadrée par des flics et avec une veste sur la tête pour pas qu'on vous reconnaisse.

  • en refusant de travailler avec des dossiers de soins qui n'ont de dossier que le nom;

  • etc...


Eh bien, elles étaient toutes d'accord avec moi, me donnant même quelques anecdotes mais....voilà, la suite, c'est : « Qu'est-ce que tu veux faire ? Ca ne changera rien. Il faudrait qu'on le fasse tous mais c'est pas possible !! »


Eh ouais, malheureusement, amener tous les IDE à redresser la tête, à ne plus courber l'échine devant des médecins omnipotents ou des directions/administrations abusives, ce n'est pas évident.


La crainte de perdre leur boulot ? Il y a pénurie d'IDE, les jeunes diplômées fuient les endroits où elles ont le sentiment de mettre en péril leur diplôme – le nombre d'intérimaires qui refusent de remettre les pieds chez nous est assez éloquent – les anicennes démissionnent parce qu'il ne leur est pas possible de continuer dans ces conditions. S'il n'y a plus personnes pour bosser, s'ils se mettent à virer à tour de bras des personnes qui ne font que respecter la loi, au bout d'un moment ils réagiront peut-être ?


Oui, dans tout ça il y a les patients. Mais ne croyez-vous pas que les patients préfèreraient être pris en charge par des équipes en nombre suffisant, qui ne travaillent pas dans le speed, qui ont le temps de les prendre en charge correctement ?


Ah ! mais comme le dit notre cher Sarko et le confirme l'admirable Bachelot, ce n'est pas une question de moyen, c'est une question d'organisation ! Donc, en cas de bug, c'est la faute aux administrations et autres Directions, alors ? Si seulement c'était aussi facile.


Cependant, que dire d'une clinique qui accepte plus de patients qu'elle n'a de lits (à quand les lits superposés dans les chambres ?); qui impose un voisin à des patients payant pour une chambre particulière sans leur dire qu'ils ont le choix de dire non, quand il ne sagit pas de réquisition pour raison sanitaire (genre épidémie, grande catastrophe sanitaire); que dire d'une clinique qui à 18h n'a encore trouvé personne pour venir en renfort pour la nuit parce que trop de patients pour seulement 2 infirmières ? Hein ? Je vous le demande. Et s'il y a un bug, qui s'est qui se retrouvera en première ligne ????


Pourquoi les structures n'abuseraient pas de nous puisque nous nous démenons pour leur montrer que même dans des situations abracadabrantesques, nous sommes capables d'assurer et de mener à bout toutes les tâches qui nous incombent ? Pour eux, nous sommes des superwomen et supermen qui y arrivont quoiqu'il arrive, alors pourquoi améliorer nos conditions de travail ?


Pourquoi sommes-nous si peureux ? Ah oui, c'est vrai qu'avec la baisse du pouvoir d'achat et les salaires bas, tout le monde ne peut pas se payer le luxe d'être révolutionnaire. Mais en même temps, si nos grands pontes, qui sont bien au-delà de toutes ces considérations, voient que le mouvement n'est pas suivi par la majorité, ben, ils n'auront plus qu'à rire sous cape de nos pauvres revendications, qu'à se foutre de notre gueule en disant que nos grèves ne sont même pas foutues d'être visibles ni encore moins d'être suivies. Et nous, nous n'auront plus qu'à retourner courber l'échine au turbin.


Ah la la, la vie, j'vous jure ! Plus ça va et moins j'ai envie de devenir infirmière. Trop de responsabilités pour trop peu de reconnaissance, trop de risque pour pas beaucoup de soutien. Et en plus, je risquerai de devenir la bête noire, sans jeu de mot, de mon service parce que trop respectueuse des lois. Eh oui, la prison, ça me fait peur bien plus que des remontrances injustifiées alors que je suis dans mon bon droit. Car même si vous réussissez à sauver quelqu'un, on vous poursuivra quand même pour avoir dépasser vos compétences ou fait quelque chose de contraire à la législation. Aberration ? Non, réalité de la vie !


En tant qu'AS, il m'arrive souvent de dépasser mes compétences. Pas parce que j'y suis obligée, nulle ne m'oblige à le faire. Je choisi ce que j'ai envie de faire, en accord avec mon IDE et en lui demandant de vérifier derrière moi. Je le fais pour moi, pour mon plaisir personnel et pour aider mon IDE. A quoi ça me sert ? Eh bien, à « former » les interimaires qui débarquent dans le service sans tout savoir, les nuits où nous n'avons pas d'infirmières titulaires. Mais bon, pour info, après nous être rebellés, mon collègue AS et moi, avec l'appui de nos collègues de jour, la Direction ne nous colle plus 2 IDE intérimaires qui ne connaissent pas le service en même temps la nuit. Vous voyez, quand on ne se laisse pas faire, les choses peuvent changer ! ;-))


Par contre, si un jour je tombe sur une IDE qui veut me forcer à dépasser mes compétences, qui me mets la pression parce que je refuse de faire ce qu'elle me demande alors que je n'ai pas le droit de la faire, eh bien, je m'opposerai à elle. Et je dirai « NON ». Paradoxal, hein ?! Mais ça se tient.


Bref ! Tout ça pour dire que ce n'est pas demain la veille que les mentalités changeront. Ce n'est pas demain la veille qu'on aura notre grand mai 68. Je comprend qu'il y en ait qui ait peur pour leur emploi mais peut-être qu'ils devraient avoir un peu plus peur pour leur diplôme ? Qu'il y a t-il de si terrifiant à respecter la loi et à le faire savoir ? Qu'il y a t-il à s'opposer pour la bonne cause ? Pourquoi, en général, les AS ont plus de facilités à refuser les dépassements de compétence, à dire « non, ça, je ne le fais pas » ? Allez, les IDE, courage, dites « NON » quand vous devriez le faire. Devant un tribunal, vous serez dans votre bon droit. Vous êtes renvoyées parce que vous avez osez dire un « non » tout à fait justifié ? Pensez aux Prud'hommes. On vous menace ? Menacez.


Mais, b...., ne vous laissez plus marcher sur les pieds !!!!!! (ouais, je sais, c'est facile à dire mais faut le dire ;-))


Bon, je vais arrêter là ma diatribe, ma crise de logorrhée et vous laisser méditer là-dessus. A la prochaine !

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article